K-Shock

[Critique BD] K-Shock – Quand l’Hallyu (et la K-Pop) rencontre la BD

K-Shock Il me semble que c’est lundi dernier que j’ai vu passer cette bande dessinée dans mes infolettres quotidiennes que je reçois. J’ouvre le courriel de Glénat BD. Qu’est-ce que je vois ? Une couverture de bande dessinée avec le drapeau de la Corée du Sud. Alors, ça a tout de suite piqué ma curiosité. Et encore plus, après avoir lu le résumé. Une histoire mettant en scène le monde de l’Hallyu et la K-Pop.

Pour commencer, « Hallyu » est un terme pour définir la vague de popularité pour la culture sud-coréenne, comme la musique (K-Pop), la télé (K-Drama), le cinéma, la langue ou encore la nourriture. Le mot Hallyu est apparu à la fin des années 1990. La vague de la Corée du Sud est devenue un phénomène mondial avec YouTube, ce qui a facilité l’accès et l’émergence de cette culture.

 

Pour revenir à la BD, K-Shock :

C’est l’histoire d’Alice, une jeune étudiante française, qui est allée vivre sa passion pour l’Hallyu à Séoul. Malheureusement pour elle, Alice se rend rapidement compte qu’il est difficile de faire sa place dans ce pays et dans cette culture. Bien qu’elle apprend le coréen, il est dur pour elle de rencontrer des gens puisque les Coréens (comme la majorité des Asiatiques) veulent pratiquer leur anglais quand ils rencontrent des étrangers. Alice évolue au sein de gens comme elle, des expatriés. Son rêve est plutôt désillusionné. Elle fera la rencontre (c’est un grand mot) de Jae Sun, un jeune rappeur coréen du milieu underground. Celui-ci deviendra très vite populaire après qu’une performance musicale soit mise en ligne. Ce qui attira l’attention d’une des plus grosses agences de divertissement, JG Entertainment. Jae Sun participera à la téléréalité pour former le prochain Boy Band de l’agence. Jae Sun fera-t-il partie de la formation Shock ?

 

L’auteur et illustratrice Christelle Pécout nous plonge dans les dessous de l’industrie de la K-Pop avec sa bande dessinée K-Shock. Bien que la prémisse soit très passionnante et intéressante (pour moi), je trouve que le scénario n’est pas à la hauteur. L’histoire est très légère et elle se lit très rapidement. Le scénario, tout comme les personnages, n’est pas assez développé. Il manque un peu de mordant et revirement. Le scénario se déroule assez rapidement sur une centaine de pages. Par moment, j’ai trouvé que l’histoire manque de notion du temps. C’est-à-dire que les événements s’enchaînent les uns après les autres, mais le lecteur ne voit pas passer le temps. Par exemple, quand le personnage de Jae Sun est choisi pour JG Entertainment pour participer à First Shock, toutes les scènes relatant la progression de cette téléréalité ne sont pas montrées. En quelques dizaines de pages, on passe de Jae Sun comme trainee (terme pour un apprenti qui s’entraine à devenir un idol) à Jae Sun membre du groupe Shock. C’est peut-être parce que j’ai écouté plusieurs téléréalités survival de la Corée du Sud que je trouve qu’il y a une coupure au niveau du rythme du scénario. Il y a plusieurs autres scènes qui ont le même déroulement avec ce manque de temps.

Malheureusement, ce n’est pas tant un détail que l’on peut passer par-dessus puisque Jae Sun est quand même l’un des deux personnages principaux. Tout ce qu’il fait semble trop facile et la courbe d’évolution est absente. Jae Sun est tout le contraire d’un idol. Il est rebelle, il fait et dit ce qu’il veut.

Pour ce qui est d’Alice, j’ai trouvé que son histoire est sans importance. Ce personnage donne la vision d’une étrangère de la Corée du Sud, un peu comme l’auteure qui est une Franco-Coréenne née en Corée du Sud, mais qui a vécu tout le temps en France. Dans le résumé, l’une des choses qui m’avaient donné envie de découvrir cette BD, c’est l’impression que le destin d’Alice et de Jae Sun est lié. Le résumé parle d’une rencontre, je dirais plus qu’ils se croisent que trop brièvement au début et vers la moitié du livre. Il est écrit : « Mais sa rencontre avec Jae Sun […] pourrait changer la donne… » Avec cette phrase-là, je m’attendais à ce qu’il y ait une relation amoureuse pour donner une raison à Alice de vouloir rester plus en Corée du Sud puisqu’elle semble blasée de la culture Hallyu. Mais, non ! Il n’y a rien de tout ça.

 

 

Une chose qui m’a fait décrocher de K-Shock, c’est que l’auteure tente de dresser un portrait « fidèle » de l’Hallyu et de la Corée du Sud. Cependant, le récit est rempli de noms fictifs. Par exemple, l’agence JG Entertainment serait l’équivalent de YG Entertainment et/ou JYP Entertainment. V-Net est la chaîne MNet. Give Me The Money est Show Me The Money. Cube Studio est Cube Entertainment. Tous ces petits détails enlèvent un peu de réalisme à l’histoire. En même temps, je peux comprendre que l’auteure n’a peut-être pas eu les droits d’utilisation. Le seul nom original, c’est First Shock qui dans une adaptation des survivals à la SIXTEEN, Who is Next : Win, No Mercy, etc.

Une chose que j’ai appréciée de K-Shock, c’est l’utilisation de terme coréen dans les dialogues. Et il y a même une page avec le lexique. Cela renforcit l’immersion dans la culture coréenne. Par contre, c’est légèrement dérangeant de devoir retourner à tout moment au début du livre afin de comprendre la phrase complète. Je crois que c’est plus un problème au niveau de la BD numérique où il faut faire plusieurs cliques avant d’y arriver au lexique et de retourner là où on est rendu. Pour ce genre de chose, j’ai une préférence à des notes au bas de page ou sous la case. Il faut dire qu’il y a des mots coréens qui sont utilisés qu’une ou deux fois. Alors, ce n’est pas des mots que l’on s’habitue de lire régulièrement.

La bande dessinée ouvre avec une préface de Claire Solery (blogueuse sur la culture asiatique) qui nous dresse un portrait de la K-Pop et Corée du Sud. La BD se termine sur des explications un peu plus détaillées du phénomène Hallyu et Corée du Sud.

 

Pour ce qui est des dessins, K-Shock est à la limite entre le manhwa (manga) et la bande dessinée européenne. C’est-à-dire que tous les dessins sont en noir et blanc avec beaucoup d’utilisation de lavis, même si tous les dessins semblent faits à l’ordinateur (crayonné à la main puis numérisé et colorié dans Adobe Photoshop). Il y a une certaine volonté de l’auteure de mélanger les styles. Par contre, les dessins ne m’ont pas vraiment plus. Par moment, je trouve que les dessins ressemblent plus à des esquisses. Il manque une couche de finition (ou de maîtrise du dessin) quand on commence à s’attarder aux détails qui se retrouvent en arrière-plan. Par contre, il y a aussi de belles pages comme la première et de belles compositions.

De plus, les personnages finissent tous par se ressembler physiquement. Et les personnages manquent d’expressions faciales et de vigueur. Les premières pages (5 à 11 et 24-25) ont une mise en page assez dynamique puisque l’auteure joue avec les cases, mais par la suite, les mises en pages de K-Shock deviennent rigides puisqu’elles respectent une même grille et les mêmes marges. Bon, j’avais déjà vu quelques aperçus de pages, et ça ne me dérangeant pas trop. Cependant, c’est durant une lecture intensive que les dessins ont commencé à m’agacer.

 

Bref, K-Shock a une prémisse qui semblait très intéressante, mais après avoir lu l’histoire, je dois dire qu’elle m’a déçu, surtout la fin. La BD se lit relativement très rapide, ce n’est que 112 pages. J’ai de la difficulté à recommander ce récit pour plusieurs raisons nommées plus haut. En même temps, est-ce que j’ai trop de connaissances de la mode Hallyu pour apprécier K-Shock à sa juste valeur ? Je crois que cette BD peut être une porte à découvrir le monde de la K-Pop et de la Corée du Sud pour quelqu’un qui adore la BD. K-Shock est quand même une bonne histoire à découvrir.

 

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