Endorphine a été/sera présenté le :
- Jeudi 15 octobre à 19 h 30 au Cineplex Odeon Quartier Latin (Salle 10)
- Dimanche 18 octobre à 13 h 00 au Pavillon Judith-Jasmin annexe (Salle Jean-Claude Lauzon)
Endorphine est un de ses films qui est dur à expliquer puisque le scénario est très complexe. Le film Endorphine propose trois histoires qui s’entremêlent. Il y a Simone qui est à l’adolescence et qui va être témoin du meurtre de sa mère. À cet âge, elle a une drôle de perception de la vie parce que la mort de sa mère ne semble pas l’affecter, c’est ce qu’elle pense, et elle a une obsession et un désir d’embrasser quelqu’un (expérimenter ce geste). Il y a aussi Simone dans la vingtaine qui tente de vivre sa vie tout en gérant des crises de panique. On découvre qu’elle aussi est obsédée, mais ce n’est pas la même chose. Elle a une fixation sur sa voisine d’en face. Et finalement, il y a Simon qui est dans la soixantaine. Elle est une spécialiste de la physique quantique. Les histoires se mélangent et tentent d’avoir du sens.
Le schéma narratif d’Endorphine est vraiment complexe à suivre puisque c’est une histoire sur la notion et la perception du temps et de l’inconscient. J’aimerais bien voir un schéma qui explique la ligne du temps de ce film puisque l’histoire prend souvent des directions différentes, ou bien elle fait des boucles (passé, présent et futur), ou encore il y a des sauts dans le temps. Et chaque histoire finit par se répondre et ça essaie de donner du sens, même s’il n’y en a pas vraiment (selon le réalisateur).
Le film Endorphine commence avec une magnifique scène d’un rêve de Simone 20 ans. Quand elle avance d’un pas, le temps change. Et si elle recule d’un pas, le temps recule. WOW, c’était ingénieux et ça a donné le ton au film. Le scénario est revenu quelques fois à cette scène. Chacune des versions de Simone est très bien accompagnée, soit par Guy Thauvette, Monia Chokri, Stéphane Crête, Anne-Marie Cadieux, Théodore Chouinard-Pellerin, Fanny Migneault-Lecavalier.
Simone 13 ans (interprétée par Sophie Nélisse)
À treize ans, Simone a beaucoup de questionnements et d’obsessions. Elle s’interroge où l’on va quand on s’évanouit. Elle tentera d’élucider cette préoccupation avec un jeu d’étranglement (jeu de non-oxygénation ou en anglais choking game) avec son cousin (mais que c’est ça comme jeu de fou ?!). En même temps, elle a une fixation sur le désir d’embrasser une personne. Ce qui mènera à quelques moments cocasses où elle tente d’embrasser plusieurs choses (langue de bœuf, un poteau en plein hiver). Dans cette partie d’histoire, la notion du temps s’entremêle. L’histoire se fait souvent des boucles, tout ça pour faire revivre la mort de la mère de Simone. Alors, qu’est-ce qui est vrai et qu’est-ce qui fait partie de l’inconscient ?
Simone 25 ans (interprétée par Mylène MacKay)
Est-ce que c’est la même Simone ? Ce n’est pas si clair. Est-ce que Simone travaille dans le stationnement du bâtiment où sa mère a été assassinée ? À 25 ans, elle a des impressions de déjà vu. Ce qui cause une paranoïa chez Simone qui vit des sensations étranges et qui revit le passé. Ses obsessions évoluent… Simone qui n’a jamais eu de relation sexuelle a une fixation pour la voisine d’en face. Elle a un étrange rapport à la photographie. Est-ce que c’est un reflet de l’obsession de notre société avec les réseaux sociaux (Instagram) ? Ce qui est bien avec Simone 25 ans, c’est à travers de la notion du temps, Simone tente d’affronter ses peurs et ses obsessions.
Simone 60 ans (interprétée par Lise Roy)
Quant à la version de Simone à 60 ans, l’obsession du personnage est à l’opposé des deux autres versions. Avec son métier en physique quantique, la motion du temps devient l’une des fixations. J’ai beaucoup apprécié ce segment, il y a beaucoup de questionnement sur le temps et ça déformation :
- Est-ce que le temps est unidirectionnel ?
- Est-ce que le temps peut bifurquer ?
- Est-ce que le temps peut se diviser ?
- Est-ce que le temps avance ?
- Est-ce que le temps est un effet secondaire de la conscience ?
- Est-ce que le temps est une limite du cerveau ou de l’inconscient ?
- Est-ce que le futur existe ? (Mais qu’on ne peut pas y accéder)
- Est-ce que le futur est déjà écrit ?
- Est-ce qu’on est conscient de notre mort ? Est-ce qu’on vit pour se diriger vers sa mort ?
Tous ces questionnements se font de la manière narrative avec des explications vidéos où l’on peut voir Simone 13 ans et Simone 25 ans. Cette partie fait le lien entre les autres histoires et ça explique un peu le schéma narratif du film Endorphine. Par la physique quantique, Simone explique la nature et la sensation du temps.
Endorphine est un film assez étrange. Le film a une belle déconstruction structurée. Ce qui est dommage de mon expérience, c’est que je prenais des notes et j’essayais d’analyser le film durant le film. Pour apprécier à 100% l’expérience d’Endorphine, il faut se laisser aller dans le film. Il ne faut pas trop se poser de questions même si le film est un grand labyrinthe mystérieux. Bref, ce n’est pas que les Japonais qui font des films « fuckés » comme TAG de Sion Sono. Endorphine est une expérience à voir absolument puisque ça déconstruit tous les codes du cinéma (ou presque). J’aimerais voir plus de films qui s’inspirent de genre cinématographique déconstruit. Est-ce que perdre conscience, c’est prendre conscience du futur ?
Séances de Q&A après le film
C’était vraiment apprécié d’avoir une séance de questions et réponses avec le scénariste-réalisateur André Turpin. Il a pu éclairer ma perception du film, même si Endorphine est un mystère et film sans sens.
La première question a été à propos des inspirations d’André Turpin pour le film. Pour parler du temps, il s’inspire des notions de la nature du temps (moderne) d’Einstein selon la physique quantique. Le temps inconscient et sa nature semblent le passionner énormément. Cinématographiquement, c’est l’œuvre de Christopher Nolan et le film Interstellaire. Il aime le fait de ne pas expliquer le temps dans son film. Il essaie de créer des vertiges du temps et d’être dépaysé. Ce qu’il a tenté de faire avec son film, c’est un casse – tête sans que ça ait de sens. Il espère que le spectateur a pu rêver l’instant d’Endorphine.
La deuxième question était à propos de vouloir faire d’autres films sur le temps. Oui, c’est sûr parce qu’il n’a pas pu intégrer tout ce qu’il voulait mettre. En même temps, non, puisque André Turpin prend environ 10 ans pour écrire un film. Aussi, un film, c’est toujours du temps qu’il faut construire avec des images et du son.
La troisième question était à propos du titre. Le réalisateur le sait que ce n’est pas le meilleur titre, mais c’est le mieux que lui et la production ont trouvé lors de séances de remue-méninge. Au moins, il y a un lien entre les histoires parce que l’endorphine, c’est une substance qui crée des sensations contre la douleur. Simone 13 ans : La recherche de sensations ; Simone 25 ans : La peur ; Simone 60 ans : L’orgasme.
La quatrième question était à propos de la relation et de l’importance des doigts dans le film. Quand on compte régulièrement ses doigts, on finit par prendre plus conscience. Dans un rêve, si l’on compte ses doigts, c’est pour contrôler le rêve, un genre de lucidité. Alors qu’il est impossible de compter jusqu’à 10 dans un rêve. Donc, l’arrachage de doigts signifie l’inconscient.
La cinquième question était à propos du meurtre de la mère de Simone. Le réalisateur ne voulait pas expliquer puisque son film n’est pas un polar ni une histoire de meurtre. Ce n’est qu’un prétexte pour voyager dans l’inconscient. Au début du projet, il y avait une conversation entre la mère et le tueur. Cependant, cette partie a été coupée à la deuxième version du film.
La sixième question était à propos de l’allemand. Pour André Turpin, l’allemand a une très belle sonorité. Aussi, c’est pour justifier que les dialogues dans un rêve sont toujours incompréhensibles.
La septième question était à propos des photographies de corps couché par terre. C’était plus un clin d’œil au scénario d’origine. Aussi, il fait allusion au médium qu’est Instagram, c’est quelque chose qui le fascine.
La huitième question était à propos du temps. Le réalisateur a commencé son explication par des questions. Est-ce que le futur existe ? Est-ce que l’espace-temps existe ? Il répond que théoriquement on pourrait voir le futur. Mais, dans son film, c’est seulement dans l’inconscient que c’est possible. Pour lui, le présent est comme un lecteur DVD ou l’aiguille d’une table tournante.
La neuvième question était à propos de Simone 25 ans. C’est une tout autre personnalité, mais elle vit souvent des impressions de déjà vu. Elle déforme ce qu’elle rêve.
La dixième question était à propos du montage du film. Oui, il y a eu beaucoup d’éléments coupés au montage. André Turpin a voulu raccourcir, épurer et simplifier le plus que possible Endorphine. (Je n’ose pas imaginer les premières versions du film si ça, c’est la version simplifiée.)
La onzième question était à propos des références cinématographiques du réalisateur. Pour ce qui est du scénario, il s’inspire de David Lynch. Et pour les références formelles, c’est les frères Coen et le film No Country for Old Men.
La douzième question était à propos du côté lumineux dans les segments de Simone 60 ans. C’est pour montrer qu’elle s’est débarrassée de sa culpabilité et qu’elle a réussi à s’épanouir.
La treizième question était à propos du sexe. Le sexe n’est pas représenté dans le film. C’est plutôt un arc commun et une thématique. L’épanouissement fait partie des trois histoires. Simone 13 ans : Quelque chose de sensoriel ; Simone 25 ans : Le fait qu’elle n’a jamais eu de relation sexuelle ; Simone 60 ans : L’orgasme qu’elle a dans son rêve.
La quatorzième question était à propos du pourquoi l’utilisation du même personnage. C’est parce qu’il y a un lien entre les personnages de Simone. Aussi, comme André Turpin le re-mentionnait, les trois films se répondent avec les impressions de déjà vu. Mais, chacun a des fonctions différentes.
La quinzième question était à propos de l’utilisation des acteurs récurrents. Le meurtrier de la mère de Simone 13 ans, c’est le mari de Simone 60 ans. Ce n’est pas le même personnage. Les acteurs qui font le père, le cousin et la mère du cousin de Simone reviennent dans au moins deux des trois histoires. André Turpin donne des clés sur l’histoire, mais en aucun cas, ce n’est des réponses.
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Endorphine
- Réalisation : André Turpin
- Scénario : André Turpin
- Interprètes : Sophie Nélisse, Mylène Mackay, Monia Chokri, Anne-Marie Cadieux, Stéphane Crête, Lise Roy
- Fiction, Sexualité, Fantaisie, Crime
- Québec, Canada
- 2015
- 84 min
- Français
- Compétition internationale
- http://nouveaucinema.ca/fr/films/yakuza-apocalypse
- Jeudi 15 octobre à 19 h 30 au Cineplex Odeon Quartier Latin (Salle 10)
- Dimanche 18 octobre à 13 h 00 au Pavillon Judith-Jasmin annexe (Salle Jean-Claude Lauzon)