Dans ce texte, je vais voir parler de ma seconde expérience du film interactif Late Shift et les différences que j’ai constatées. Ma critique du film se retrouve ici http://zonetechnoculturelle.ca/fnc-2016-late-shift-un-film-dont-vous-etes-le-heros/.
Premièrement, l’expérience de Late Shift est légèrement différente dans une salle de cinéma comparé à un visionnement en solo sur un iPad. La chose qui différencie est que l’on doit utiliser l’application CtrlMovie afin de pouvoir sélectionner notre choix et c’est la réponse la plus populaire qui va contrôler le déroulement du film. Avec l’application, on se retrouve avec des choix de réponse au lieu de pouvoir interagir dans certaines scènes. C’est l’un des seuls films où l’on a le droit d’utiliser son téléphone intelligent durant la projection. Mais ce qui est dommage de l’application, c’est qu’elle n’est pas un second écran. C’est seulement une télécommande pour envoyer un choix. Ça aurait été tellement mieux si le téléphone avait été un complément à l’expérience cinématographique.
Deuxièmement en ayant moins de choix d’interactions, j’ai eu l’impression que la trame narrative est un peu plus contrôlée. Je m’explique : il y a une scène où le personnage principal doit retrouver une personne qui est à l’hôpital. Dans l’application, je devais « swiper » sur l’écran sur téléphone intelligent de Matt afin de reconnaître une personne. Cependant durant le visionnement en salle, il n’y a pas eu ce genre de choix. Dans ma première expérience, je n’ai pas reconnu de gars ce qui m’a fait prendre un autre parcours dans le film. Au moins, ça m’a fait découvrir des chapitres de l’histoire dont je n’avais pas vu la première fois. Il y a quelques autres exemples semblables tout au long du film. Parfois au lieu d’interagir dans l’environnement, c’était un choix de réponse pour prendre la même décision (ce qui devrait donner le même résultat).
Troisièmement, j’ai été agréablement content que les décisions prises aient mené à une fin alternative bien que le public ait pris plusieurs fois les mêmes décisions que lors de mon premier visionnement. Dans le Q&A, le réalisateur et la productrice ont soulevé le fait que l’auditoire a souvent tendance à prendre les choix plus sombres et plus agressifs. Et c’est amusant dans la salle puisque quelques personnes tentaient d’influencer le vote de l’auditoire. Néanmoins, j’ai été surpris par certains choix du public et de la différence entre les deux fins que j’ai vue (il y en a 7 au total).
Bref, c’était tout aussi intéressant que mon premier visionnement de Late Shift, même si la surprise n’était pas autant au rendez-vous. Je suis curieux de voir le film en prenant un parcours plus du côté clair de la force (en allant directement voir la police au lieu d’embarquer dans une magouille et fuir).
Q&A avec Tobias Weber et Caroline Feder
- Les inspirations ?
Certaines personnes ont des choix impossibles à prendre dans la vie et c’est justement les thèmes des décisions et des conséquences qui ont été les inspirations. C’est un choix très intéressant à donner aux spectateurs - Les fins alternatives ? (Plusieurs questions autour de ce sujet)
Il y en a 7 différentes allant de la fin heureuse à la fin tragique. Il faut revoir le film pour découvrir les autres fins ! Si le spectateur agit bien, il y aura nécessairement une bonne fin. Sans vouloir dicter une morale, il y en a une (la confiance). Cependant, le film ne se voit pas comme un professeur, mais un outil pour expérimenter les choix et les conséquences. Bien sûr, ces choix moraux sont basés sur ceux du réalisateur et des scénaristes. - Analyser des données recueillies ? (Plusieurs questions autour de ce sujet)
Oui, l’équipe de production recueille les choix pris durant les projections. Il est intéressant de voir ce que les gens choisissent. Il y a souvent le même schéma narratif qui revient. Pourquoi une raison X : les choix les plus agressifs reviennent souvent. Le reste de l’auditoire finit par suivre et être influencé par le parcours pris.
Il y a de bonnes raisons au fait que le pourcentage de la réponse la plus populaire ne soit pas affiché. Ça pourrait être une distraction durant le film. L’équipe de production a fait le choix de ne pas l’afficher pour garder une pleine expérience cinématographique. - À propos de la production ?
Ça a pris 3 ans pour développer ce film (du script à la projection). Le script doit faire environ 8 à 10 cm d’épaisseur. Ce qui veut dire que toutes les options ont été écrites avant le tournage et il n’y avait pas la place à l’improvisation. Ce n’est pas comme un GTA où le spectateur peut faire ce qu’il veut. Avec 4h de contenus et 180 points d’interaction, cela donne une certaine liberté aux spectateurs. La manière dont le film a été pensé, il y a toujours la possibilité (jusqu’à un certain point) de corriger le parcours pris. - La musique ?
La musique est dynamique dans le film. Ça a été un beau défi à réaliser la trame sonore puisqu’elle évolue selon les choix pris. - Une sortie en salle ?
Il y a eu le Royaume-Uni, la Suisse et la Russie. Sinon, il y a toujours l’application. Tobias Weber a d’autres projets en tête !